lundi 21 juin 2010

Pas d'art sans liberté



Il était une fois une enseignante Janine Kotwica, spécialiste du livre pour enfants qui eut la bonne idée de rassembler pour une exposition des dessins d’illustrateurs de renom, dessins préexistants ou commandés pour l’occasion. Le titre sulfureux de cette exposition étant : Pour adultes seulement : quand les illustrateurs de jeunesse dessinent pour les grands. 
Las, c’étaient des dessins érotiques ! L’exposition a beau avoir été commandée par le directeur de la bibliothèque départementale de la Somme qui est rappelons-le un établissement qui ne reçoit pas d’enfant, mais uniquement les bibliothécaires relais des petites communes rurales du département ; les œuvres ont beau avoir été présentées au directeur du développement culturel du Conseil général de la Somme ; l’affiche de Léo Kouper a beau avoir été validée parmi cinq propositions par les interlocuteurs départementaux… Cela n’a pas empêché Monsieur Minable (pardon pour la faute de frappe, il faut lire Manable) ci-devant président socialiste du Conseil général de la Somme d’interdire à 11 jours de son inauguration cette exposition.
Voici le communiqué de l’Observatoire de la Liberté d’expression de la Ligue des droits de l’homme :
«Le conseil général de la Somme se couvre de ridicule en censurant une exposition de dessins
L’exposition « Pour adultes seulement : quand les illustrateurs de jeunesse dessinent pour les grands », qui devait se tenir à la bibliothèque départementale de la Somme, à Amiens, du 19 mai au 19 juillet, a été annulée, à onze jours de son inauguration, par le président du conseil général de la Somme, alors qu’elle était programmée depuis plus d’un an.
Le directeur de la bibliothèque a passé commande de cette exposition à Janine Kotwica, enseignante et spécialiste du livre pour jeunes. Vingt-six dessinateurs de renom y participaient, pour une soixantaine d’œuvres de grande qualité dues à Lionel Koechlin, Bruno Heitz, Nicole Claveloux, Tomi Ungerer… Le résultat, validé par le directeur, était une exposition d’un érotisme chaste et malicieux. Qui aurait pu s’offusquer de découvrir qu’André François, qui amuse les enfants depuis un demi-siècle avec ses Larmes de crocodile, avait aussi réalisé des gravures de sirènes aux seins nus, ou que Louis Joos, qu’inspirent ordinairement les musiciens de jazz, peignait parallèlement des corps féminins ? L’affichiste de cinéma Léo Kouper (Jacques Tati, Charlie Chaplin) en avait réalisé l’affiche, qui devait également former la couverture du catalogue. On y voyait un simple pinceau vertical, sur fond rose, pouvant donner l’illusion, de très loin, d’un pubis.
Comment cette idée de censure est-elle venue à Christian Manable, président socialiste du conseil général de la Somme ? Aucune explication officielle n’a été donnée à cette annulation. Le rôle des politiques n’est pas de réprimer les œuvres mais de favoriser leur diffusion. Il appartient au public de juger l’exposition, et les élus doivent laisser le public accéder librement aux œuvres. Le rôle des politiques est aussi de tenir les engagements pris.
L’Observatoire de la liberté de création demande au conseil général de la Somme de revenir sans délais sur sa décision ridicule, et exige que cette exposition puisse ouvrir comme prévu et que son catalogue soit imprimé.
Les artistes, la sensualité et l’humour font notre monde meilleur, bien plus que les censeurs.»
Pas d’art sans liberté

mardi 15 juin 2010

Marche ou rêve


Désormais, ici le 15 de chaque mois, c’est le jour de la photo du mois. Le thème à  traiter en juin est « Sur la route ».
J’ai choisi cette photo prise au cours de la manifestation intersyndicale du 27 mai 2010 à Nice pour la défense du régime des retraites en France.

La route est envahie par les manifestants et leurs banderoles, ici ce sont des lycéens qui renvoient le président à l’école. J’aime bien l’idée d’être sur la route pour faire avancer les choses. Sur la route de la vie, cheminant de l’âge du lycée à l’âge de la retraite... 
Aller voir les contributions des autres blogueurs à cette opération mensuelle : 
olivierAnneVéroniqueVirginieShandaraLooangeJo AnnSandrineFabienneDamienMarieNolwennCélineAnne fra SveitsCéliaCaroGuillaumeMandyTitemCynthiaCarolineDoremiSophieTambour Major et Nathalie
Marche ou crève, marche ou rêve… 

mercredi 9 juin 2010

La rue est un film



Bowery est une rue de New York au sud de Manhattan. Durant les années 1920 et 1930 ce quartier s’est considérablement appauvri, Bowery devenant le symbole de la crise économique et gagnant la réputation d’attirer les alcooliques et les SDF. Entre 1960 et 1980, on y trouvait les loyers les plus bas et le taux de criminalité le plus élevé de Manhattan.
En 1955, le documentariste Lionel Rogosin y tourne On the Bowery qui raconte l'histoire de Ray, un travailleur ferroviaire, et de sa dérive dans ce quartier de clochards à la recherche d'une fête arrosée après un dur labeur, son intégration dans une bande d'alcooliques qui l’aident à dépenser son argent. En tant que nouvel arrivant dans le quartier, il paie sa tournée dans un bar avant de perdre connaissance et de se réveiller pour constater qu'on lui a volé sa valise. A partir de là, Ray commence son voyage jusqu'en enfer... Petits boulots, petites combines, mendicité, vol, tout est bon pour pouvoir se payer un verre de plus à boire.


Influencé par Robert Flaherty et la tradition néo-réaliste italienne, Lionel Rogosin crée un genre cinématographique entre le documentaire et la fiction où le hasard de la vie s’invite dans le film entre vie réelle et scénario écrit après une longue immersion dans le milieu de ces laissés pour compte de la société. Tous les protagonistes du film sont des hommes et des femmes qui vivent depuis des années à Bowery.
Oui, la rue est un film. Et quel film ! Grand prix du documentaire au Festival du film de Venise en 1956, Best documentary of the year au British Film Academy Award en 1956, il reçoit le Robert Flaherty Award en 1957… Ce film vient d’être réédité par Carlotta avec l’aide de la cinémathèque de Bologne. Le DVD contient de plus de remarquables compléments de programme  avec des entretiens avec Lionel Rogosin, un entretien avec Gian Luca Farinelli le directeur de la cinémathèque de Bologne et Une promenade dans le Bowery aujourd’hui.
La rue est un film… à (re)découvrir